16 septembre 2013

DES PETITES PIS DES GROSSES BIBITTES

Pendant les pluies de la mousson, la ville rose devient brique et les rues deviennent des lacs de soupe aux vidanges. Comme un chien: Moins joli et plus odorant mouillé. Je marche, jusqu’aux genoux, dans le bouillon brun quand je suis frappé par un éclair de génie. "Ça serait peut-être plus agréable si je sortais des grandes villes sales..." Ok go!


En Inde, l'histoire n'est que légende. On distingue rarement le vrai (si vrai il y a) du faux, les faits des fictions. Je me trouve à Pushkar, un village de 15 000 habitants recensés, qui aurait été fondé il y a 60 000 ans par Brahma lui-même. Bien sûr... Ici, les hommes les plus sobres sont habillés en blanc et orange vif. Les femmes sont un feu d'artifice de paillettes multicolores. Pour en faire un portrait, la palette du peintre devra être énorme avec beaucoup de bleu poudre pour le fond. Jour et nuit, les dévoués chantent des mantras dans des micros de mauvaise qualité amplifiés par des speakers métalliques. Souvent plusieurs chants se mêlent, comme des sourds qui jamment. Trame sonore divine!

Les rues étroites sont déblayées par des madames avec balais et brouettes. Ça fait changement des grosses grattes. Non, je fais pas allusion au Québec quand je parle de grattes. En Inde aussi on déblaie les rues, de vidanges! Ça s'accumule comme la neige de janvier et les grandes villes comme Jaipur ou Amritsar ont le même genre d'équipement qu'on utilise pour notre neige.

Revenons à Pushkar, la capitale du spirituel en boîte et des faux quêteux. Les faux, ce sont ceux qui négocient ce que tu leur donnes. Criss t'es quêteux, prends ça pis ferme ta yeule! Ah qu'il est difficile de pas s'emporter avec eux! Je rumine encore des pensés racistes inspirées par tous ces gens médiocres que j'ai croisés dans toutes les grandes villes que je viens de visiter. D'un coup, je me fais sortir de ma bulle par un visage familier. C'est Rahul avec qui j'ai passé une partie de l'été dans l'Himachal. " My god! Qu'est-ce que t'as fais à tes cheveux? Tu as l'air d'un 'tit cul!"

Rahul est début vingtaine. Dur d'être précis puisqu'il sait pas en quelle année il est né. Pour sûr, il est né à Pushkar et il fête sa naissance chaque fois que son boss a besoin d'un événement pour vendre plus de bières. Il travaille au 7th Dream Hotel en face du meilleur "sweet shop" du Rajasthan et peut-être même de tout le pays. On y fait bouillir le lait et le sucre pas loin de quinze heures par jour et les clients affluent du matin au soir. Quand le gars du shop m'a dit: "They're all good." ça sonnait comme un défi! Je les ai tous achetés et tous goutés. And he was right! Je reprends tranquillement le poids perdu au Ladakh.



Pas très à l'aise coincé entre Rahul et Tisha sur une vieille moto. On zigzague le trafic, les vaches et les chameaux. Il nous amène souper chez lui. Sa mère et sa sœur nous accueillent avec un sourire qui en dit plus que les quelques mots anglais qu'elles connaissent. On mange le Dal Bhati, un genre de soupe aux pois épicée (dal) servie avec riz et pains ronds (bhati). Végétarien évidemment! La viande se fait rare ailleurs en Inde, mais ici c'est carrément interdit.

Suffisait d'une soirée sympathique avec un ami pour modérer mes idées racistes envers les Indiens. En réalité, c'est vrai que c'est qu'une minorité qui se fait un devoir de rendre notre séjour dans leur coin de pays aussi désagréable que possible. Le problème, c'est que la plus mince des minorités en Inde ça fait beaucoup de monde pareil!

Six jours plus tard, Rahul nous accompagne jusqu'à Jaisalmer pour nous présenter son chum qui organise des "camel safari". Je fais confiance à Rahul autant que je peux faire confiance à un "street boy" buveur de whisky, mais ses chums, pantoute! On optera en fin de compte pour l'agence réputée Ganesh.


Le package inclut: Un chameau qui pète, qui chie et qui rumine sans arrêt, du sable, des grosses bibittes, du vent puis des éoliennes à perte de vue. Foulard pour empêcher le sable de boucher tous mes orifices pendant la nuit, non inclus. Le mal de dos et les températures au dessus de 45° sont garantis, le spectaculaire et l'expérience du désert, non garantis. *Frais de dépanneur en sus.

Parce que oui dans ce soi-disant désert, on peut commander des bières froides et acheter des cigarettes. L'expérience authentique quoi! Un peu comme si je vantais la nature sauvage québécoise à des touristes pour les amener camper à St-François, Laval en dessous des pylônes. Quelqu'un veut de quoi chez Couche-Tard?

Pendant deux jours et deux nuits, on a absorbé l'odeur des chameaux et adopté la posture du cowboy. Suffit! Reste plus qu'à revenir vers l'est à travers les champs et les déserts qui occupent tout l'espace entre les grosses villes sales du pays des rois. Je me demande ce que j'ai bien pu manquer pour être incapable de m'expliquer l'énorme flux de touristes dont le voyage en Inde se limite au Rajasthan. Avant toute place, ils viennent ici dans le désert, quand le pays offre l'Himalaya, la mer, la jungle... Pour moi, c'est incompréhensible comme visiter le Canada en commençant par la Saskatchewan...

Rahulsingh Phulwar: 0990 5002 9278
                              rahul11@gmail.com

                              Si vous passez par Pushkar appelez-le, il va vous arranger ça.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire