17 novembre 2012

FEAR AND LOATHING IN CANCÚN



On y est. Dernier arrêt avant Montréal, Cancún. Les routes droites et lisses sont bordées de fastfoods aseptisés, de concessionnaires de chars et de décorations lumineuses de mauvais goût. Je dois être endormi et je rêve à Laval. Horreur, c’est bien réel!
 
On passe ensuite à travers "Resortland" avec nos sacs achetés aux surplus d’armée et nos looks de vagabond. Les regards nous tombent dessus comme une  tonne de briques. Même mon père a un doute quand il nous voit approcher.  Après l’avoir salué,  je lui offre la bouteille de mezcal et on l’ouvre sans tarder.

Le soir, il nous amène dans le centre touristique fabriqué de toutes pièces pour les gros Américains en vacances. Tout est construit en hauteur comme si le bord de la mer était pas assez grand. Des centres commerciaux, des restaurants, des clubs et des bars répandent leur éclairage épileptique dans tous les sens. Les clubs empiètent sur les trottoirs et se livrent une bataille de son cacophonique.

Comme si la tequila à volonté de notre tout inclus ne suffisait pas, on continue à boire pour engourdir nos sens surstimulés. Je regarde déambuler les grassouillets rosés à saveur de crème solaire, les saloppes à saveur d’orgie et tous les autres "boozeux". Assis sur le bord du trottoir, je cale de la tequila de basse qualité jusqu’à ce que je me sente assez animal pour entrer dans le zoo!

Saoul comme un champion depuis des jours, je me dirige encore vers le zoo pour un énième soir de beuverie. Jean et moi titubons jusqu’au Hard Rock Cafe emboucané et on commande à boire. S’en suit un blackout terrible…

Vous vous doutez bien que j'ai pas de photo pour aller avec cet article

Je me suis retrouvé recroquevillé, nu, dans le fond de la douche.  J’ai mal et j’ai le vertige, la face étampée dans le plancher. Je commence à me questionner sur la salubrité de ce plancher sur lequel je bave. Je me demande comment ça se fait que les douches sont aussi grandes quand ma première question aurait dû être "Comment je suis arrivé là?" et surtout "Comment je vais sortir de là avec toute cette douleur?"

Si mon corps était composé à 70% d'eau, il est maintenant 30% alcool, 20% eau et 20% déshydraté. J’ai le goût du vomi dans gueule et ça brûle quand je pisse. Ma tête, aaarghh! Ma tête est dans un étau et  je crois que j’ai la cheville cassée… Je boite jusqu’en bas chercher mon père  "Jean! Quel jour on est? Qu’est qui s’est passé?"

Hunter Thompson s‘était "tapé" un magnétophone sur le chest pour savoir ce qui se passait pendant ses blackouts. J’aurais dû faire pareil parce que c’est fear and loathing in Cancún. Malheureusement, je n’ai que la mémoire de mon père sur quoi me fier pour trouver une explication. Quoique sûrement fondée sur du vrai, son histoire est floue et de toute évidence exagérée...

J’aurais supposément dansé sur le bar avec les sexy barmaids, c'est tellement pas mon genre! J’aurais aussi trébuché sur un gars mort qui venait d'avoir un accident de moto et j'aurais vomi dans un  taxi. Ça se peut... Ce qui est certain, c'est qu'il a tenté de me monter au 5e étage par l’escalier. J’étais inerte comme une poche de patate et lui chaud comme une trace de break. Pas surprenant qu’il m'ait échappé dans les marches. Mes bleus, ma cheville foulée et mes scratchs au visage le confirment et pourtant, aucun souvenir. "Papa pourquoi tu m'a pas laisser en bas jusqu’à ce que je sorte de mon coma éthylique?!" Ouch, je retourne me coucher.

Je crois que je suis le seul client qui ait jamais quitté un lundi  Les employés du resort avaient l’air vraiment troublés que je sois encore dans la chambre lundi à l’aube. Je m’esquive rapidement sans parler à personne. J’ai la nausée sur le chemin de l’aéroport et j’ai hâte d’être dans l’avion pour fermer mes yeux, mais esti que j’ai pas hâte de retourner dans la routine… 


Sometimes I think about all the places I never wanna go
Think about all the things I never wanna do
And I think about all the peoples I never wanna meet
then, I close my eyes ad I go to sleep

-NOFX



11 novembre 2012

ARE YOU ENJOYING YOURSELF?

Ce soir, vendredi, les jeunes se roulent des splifs bien dodus à l'arrière du bus comme si de rien était. Terminus Placienca. Il est tard pour magasiner une chambre. So, je loue la moins chère autour du terminus. Pour ceux qui ne sont pas au courant, pas cher + à proximité d'un terminus = médiocre. La formule est infaillible.

Alerte! Il y a un scorpion sur mon lit! Dans cette chambre c'est à peine étonnant. J'aurais pu le prendre calmement par la queue et le jeter dehors, mais je suis ben trop pissou. Il prend la fuite sous le linoleum. J'essaie de l'écraser. Je soulève le linoleum pour constater son décès, mais il se remet sur ses pattes, intact. Ça meurt pas de même ces bibittes-là! Je le lui sors donc ma lame et je le transperce à plusieurs reprises pour qu'il crève. J'ai un peu over-reacted... Violence inutile...

Plus tard, je me fais aborder: "Want some ganja "Rudebwoy"?" Il m'appelle "Rudebwoy", moi, le petit blanc de 22 ans! J'accepte son invitation au bar. Il se commande une bière et s'assoit. "Sit!" qu'il ordonne. "Alors c'est ici que ca se passe ou non?" Il me répond: "Faut tu nous achètes de la bière d'abord" Nous? Non je penserais pas! Je me retourne pour faire signe à la serveuse de laisser tomber. C'est à cet instant qu'il enlève ses lunettes fumées et découvre les veines enflées qui entourent ses yeux de psychopathe. Clair qu'il a le cerveau  plein de neige, défoncé.

J'aurais dû me méfier du gars qui porte des lunettes fumées la nuit dans un village côtier... Je me pousse! Il me suit à l'extérieur pour me faire une dernière offre. J'ai un peu de misère à dire non. J'y donne le cash. Trois minutes plus tard, il revient avec le weed. Il me rend le paquet dans une poignée de main comme la coutume le veut, sauf qu'il retient ma main bien fermement. Il me fixe avec ses gros yeux craquelés sortis de leur orbites pis il veut que je le paye! "WHAT! I just payed you man! Don't you remember two minutes ago?" C'est possible qu'il soit trop g'lé pour se rappeler,  mais je suis sûr qu'au fond il me teste voir si je vais le payer plus.

Pendant qu'il pète sa coche, je suis déjà en route avec le paquet. Oh la la qu'il est pas content! Il insiste et insiste jusqu'à ma chambre. J'y cri "Décâlisse!" même si je sais qu'il comprend kedal. Il fini par s'en aller prouvant qu'il me testait. C'est à ce moment là que je commence à paranoїer.  Est-ce qu'il va revenir? Avec ses chums?  Avec un gun? Est-ce qu'il va me faire les poches? Ou pire? Badtrip! Plein d'idées du genre se bousculent dans ma tête jusqu'à ce que je détourne mon attention vers la brochure touristique sur le coin de la table. Le titre dit "Relax you're in Belize" Ok, ok, je me calme. J'en fume un et je vais me coucher en prenant soin de bien secouer  les couvertures.

Première heure le lendemain, on déménage au Lydia's guesthouse. À chaque coin de rue, les rastamans demandent "Are you enjoying yourself?" en voulant dire "Veux-tu quelque chose?".  "Non, j'ai ce qu'il me faut." Avoir su qu'il  y avait plus de vendeur dans le petit village de Placencia qu'au Square Berri, j'aurais pas dealer avec le fucker d'hier!  Le rasta ajoute en riant "Regarde le "whitebwoy" qui essaie de marcher vite! Dans le sable, t'as beau essayer d'aller vite vite vite, tu vas juste pousser du sable en arrière et avoir l'air con." C'est tellement vrai! Merci du conseil rudeboy. Je repars en prenant soin de marcher lentement en me balançant de droite à gauche. Belize style!


Le reste de notre séjour s'est déroulé sans accroc: Plage, ganja, cuisine locale. On a passé du bon temps à Placencia. Justement le temps a passé et il m'en reste peu pour rejoindre Cancún, ça fait que je me pète un sprint jusqu'au border.

Du coté mexicain on fera halte à Tulum. C'est une sorte de prélude à Cancún. Ça sent la crème solaire, la pizza et la "booze". Les souvenir shops sont cordés serré sur la rue principale, mais ce qui en fait un "spot" de choix pour les gringos à bracelet, c'est la plage sortie directement d'une pub de Corona. On va en profiter parce que mon petit doigt me dit que les plages de Cancún font dures!

Deux jours à Tulum c'est agréable et suffisant. Le temps de visiter les ruines mayas et de déguster de la téquila dans des shops spécialisés. À force d'échantillons gratuits, je cède et je transforme mes derniers pesos en une bouteille de mezcal.


01 novembre 2012

BELIZE SHITTY

La mer des Caraïbes est brune à Belize City, mais c'est pas pour ça que les habitants l'appellent Belize Shitty. L'histoire que je connais commence en 1961.  75 % des  bâtiments de la ville furent détruits par l'ouragan Hattie. Pour la deuxième fois en trente ans la ville fut rasée. 10 ans plus tard le gouvernement du British Honduras fondait sa nouvelle capitale à Belmopan plus loin à l'intérieur des terres et moins exposée aux colères de dame nature. Pendant ce temps, la capitale déchue continue de se faire frapper par les tempêtes et les inondations, sans mentionner les problèmes reliés aux changements politiques, à l'indépendance de 1981 et à l'instabilité économique. Une grande partie des dirigeants, des fonctionnaires et de l'élite sociale abandonnèrent la ville côtière. Maintenant, les habitants l'appellent Belize Shitty!

À Benque Viejo del Carmen, le douanier check les passeports avant qu'on change d'autobus. C'est un choc. Moi qui était un géant parmi les guatémaltèques, je suis soudainement un nain blanc entouré de géants noirs. Deux peuples très différents se partagent le territoire près de la frontière. La tension est palpable. Au fil des années la politique s'est chargée d'élargir le fossé qui les sépare. Dans le bus, le contraste est comique. D'un coté les Mayas s'assoient trois par banc comme des enfants de maternelle et de l'autre, les Béliziens s'évachent tout seul dans leur siège.  Si on considère la corpulence de chacun le partage de l’espace est relativement équitable.


On débarque dans la capitale déchue un dimanche en fin d'après-midi. Les rues sont désertes et tous les commerces sont fermés. Quelques robineux dorment dans des coins ombragés. On croirait qu'ils sont les seuls habitants de la ville. On entre dans un "hostel*" ... Personne... Deuxième "hostel"… barré...  Un étrange sentiment d'insécurité s'installe! "Shitty"! Au moment où je commence à envisager de retourner d'où je viens, un Québécois nous fait signe. Derrière le grillage il demande "Qu'est-ce que vous foutez à Belize Shitty?" C'est drôle je me demandais justement la même chose! "Bienvenue au North Front Street Guesthouse." qu'il nous dit, heureux de cette rencontre inouïe.

Le North Front Street est un peu crade. Le Québécois semble vivre ici depuis longtemps. Bizarre. Il raconte des histoires vraiment triées par les cheveux. En une conversation, je peux dire qu'il vit assez loin de ma réalité. "Anyways", on loue la chambre et on met notre propre cadenas sur la porte. La confiance règne...

Dimanche soir, il y a toujours aucun commerce d'ouvert. Affamés, on marche pareil dans les rues mal éclairées à la recherche de bouffe. On sait jamais, il y a peut être un chinois d'ouvert. On se fait aborder par tout plein de gars louches jusqu'à ce qu'il y en ait un qui propose de nous escorter vers la seule épicerie ouverte. Un Chinois! Son inventaire est limité. Des ramens, des cannes de thon et on repart vers l'auberge d'un pas étonnamment rapide...

Lundi, il y a plus de vie que la veille, mais ça reste "shitty". On prend le premier bus qui sort de la ville vers le sud. Un drôle de personnage barbu, vendeur d'herbes aux propriétés supposément aphrodisiaques et curatives s'assoit derrière nous. Avec son accent du Belize il est un peu dur à suivre, mais on peut se comprendre! Comme on sait pas vraiment où on s'en va, on lui demande conseil. Après tout c'est son pays, il a surement une idée...

Terminus Dangriga. Cette ville donne aucunement envie d’y rester et il est trop tard pour prendre un autre bus. Alors, on va où? Reste plus qu’à suivre la suggestion du barbu. On va essayer de trouver un bateau pour Tobacco Caye..


Un tas de sable couvert d'arbres de jasmin et de cocotiers, perdu au milieu de la mer des caraïbes, c'est ça Tobacco Caye! On en fait le tour en 10 minutes à pied. Il y a quelques touristes richards qui s’arrêtent ici avec leur catamaran. Le capitaine fume des splifs pendant que ses employeurs s’achètent des Coca-Cola hors de prix. Il nous salue, il nous passe le joint et il part en nous disant que c'est un cadeau. Du coup, il vient de casser le stéréotype du capitaine désagréable et alcoolique. Cool!


Il y a deux types de personnes dans ce monde; Ceux qui apprennent grâce aux conseils proférés par d’autres et ceux qui apprennent seulement de leurs propres erreurs. Nous, les gens de la deuxième catégorie, on apprend souvent à la dure! Aujourd'hui, leçon de snorkeling! À peine vingt minutes plus tôt, on était près du quai en eaux calmes, pis là, on se ramasse de l'autre coté de l'ile dans des vagues d'un mètre qui se brisent sur les coraux tranchants. Imaginez-vous dans une laveuse, la peau ramollie par l'eau chaude, et quelqu'un part la laveuse avec l'ensemble de coutellerie dedans. Je pourrais difficilement décrire le "feeling" de manière plus imagée. Douleur!


Donc, leçon numéro un: En snorkeling, regarde où tu vas à place de regarder le fond et tiens toi loin des vagues. Leçon numéro deux: Prévoir plus de bandages et de désinfectant la prochaine fois...

Là, je suis plein de plaies et j'ai aucune intention de retourner dans l'eau, alors qu'ici il y a que ça à faire. Il me reste que le "hammacking". Première journée... C'est  tranquille...  Deuxième journée... C'est plate! On crisse notre camp!



*Hostel: En anglais on fait la distinction entre "hotel" et "hostel". C’est pas le cas en français et c'est pourquoi j'utilise l'anglicisme "hostel" qui décrit mieux les endroits où je crèche. Ce n’est pas une faute de frappe!